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Ferdinand Sarrien, 14 mars 1906

25 Avril 2014 Publié dans #Déclarations ministérielles

8ème législature (01 juin 1902 - 15 avril 1906)

 

 

Déclaration ministérielle de Ferdinand Sarrien qui présente son gouvernement à la Chambre des députés, le 14 mars 1906.

 

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/90/Sarrien.jpg

 


" Messieurs les députés,


Le ministère qui se présente devant vous a le très vif sentiment des difficultés de l’heure présente, des devoirs que lui impose la confiance de M. le Président de la République et de sa responsabilité envers le Parlement et le pays.

Les hommes qui le composent, quelles que puissent être les conceptions particulières de  chacun d’entre eux, se sont mis d’accord sur un programme commun, dicté uniquement par le souci des grands intérêts de la nation et par leur ferme volonté de réaliser l’union des républicains, pour résister aux entreprises des factions, pour ramener l’ordre et la paix, et pour assurer la loyale consultation du suffrage universel. Quelques semaines seulement nous séparent du jour où le pays doit procéder aux élections législatives.

Le premier devoir du Parlement est de voter, dans le plus court délai, le budget et les ressources indispensables à la marche des services publics.

Nous espérons que vous répondrez sur ce point à notre appel et que personne ne voudra assumer devant l’opinion publique la responsabilité d’avoir empêché le vote du budget, au risque de compromettre, par cela même, l’œuvre de la prochaine législature.

Le gouvernement est résolu à défendre les conquêtes laïques réalises depuis la fondation de la République.

La loi sur la séparation des Eglises et de l’Etat a rencontré à l’exécution de la disposition relative aux inventaires, une résistance aussi inattendue qu’injustifiée.

Il n’est personne, parmi nous, qui veuille porter atteinte, d’une manière quelconque, à la liberté des croyances religieuses et des cultes. La loi sera appliquée dans l’esprit libéral avec lequel elle a été votée par le Parlement, et la présence même, dans le ministère, du rapporteur de la réforme, est le sûr garant de nos intentions.

Mais nous avons aussi le devoir d’assurer sur toute la surface du territoire, l’exécution de toutes les lois.

Sous un gouvernement républicain, la loi est l’expression la plus haute de la souveraineté nationale, elle doit être partout respectée et partout obéie. Le gouvernement entend appliquer avec toute la circonspection nécessaire, mais avec une inflexible fermeté, la législation nouvelle dont certains partis de l’opposition essaient vainement de dénaturer le caractère.

Nous sommes convaincus que le bon sens public fera rapidement justice des appréciations fausses et intéressées à l’aide desquelles on tente de travestir le sens et la portée de la loi sur la séparation. Le gouvernement, dans tous les cas, recherchera les origines et les responsabilités de cette agitation politique et il usera, pour y mettre fin, de tous les moyens que les lois mettent à sa disposition.

Nous sommes résolus à donner aux fonctionnaires toutes les garanties nécessaires contre l’arbitraire et le favoritisme. Nous avons confiance dans leur dévouement pour nous aider à assurer, par le respect de la discipline et de la loi, la régularité des services publics.

Le gouvernement ne tolérera par la provocation adressée aux militaires pour les détourner de leurs devoirs envers la patrie et de l’obéissance à leurs chefs.

Il exigera de tous, officiers et soldats, un égal respect des règlements militaires et des lois républicaines. L’armée sait de quelle vive sollicitude l’entoure le Parlement. Nous ne cesserons de travailler à accroître les forces de notre défense nationale, en resserrant les liens de mutuelle confiance qui unissent étroitement l’armée et la nation.

A l’époque où nous sommes arrivés, il serait possible de tracer devant vous un long programme. Vous devez reconnaître, par sa composition même, que le gouvernement est profondément dévoué aux intérêts de la démocratie.

Dans l’ordre financier, économique et social, il s’emploiera à faire aboutir toutes les réformes réalisables, et notamment il s’empressera de soumettre au Sénat la question des retraites ouvrières. Il lui demandera de l’examiner avec tout le soin qu’elle mérite ; il fera tout ce qui dépendra de lui pour que cette loi passe le plus rapidement possible du domaine des espérances dans celui des faits.

Il ne fera pas de moindres efforts pour venir en aide à nos agriculteurs, si durement éprouvés dans certaines régions.

La douloureuse catastrophe de Courrières dont nous avons le devoir de rechercher impartialement les causes et les responsabilités, doit attirer notre vigilante attention sur les conditions de travail et sur les remèdes à employer pour empêcher le retour de si effroyables calamités.

En l’absence du gouvernement, le Parlement a pris la généreuse initiative de porter secours aux familles si cruellement frappées. Nous tiendrions à honneur d’achever l’œuvre que vous avez commencée et nous voulons, dès aujourd’hui, envoyer à ces malheureuses populations l’hommage de nos sympathies attristées.

A l’extérieur, nous entendons continuer, notamment dans les questions qui touchent à notre situation dans l’Afrique du Nord, la politique suivie par nos prédécesseurs et qui a reçue récemment encore l’approbation du Parlement.

Pleinement conscients des droits et des intérêts vitaux que notre diplomatie a pour devoir de sauvegarder, nous sommes convaincus que l’exercice de ces droits et le développement normal de ces intérêts, peuvent être assurés, sans porter atteinte à ceux d’aucune autre puissance ; comme nos prédécesseurs, à qui nous tenons à rendre hautement justice, nous avons l’espoir que la droiture et la digité de cette attitude permettront un règlement prochain et définitif des difficultés pendantes.

Fidèle à une alliance dont la France et la Russie éprouvent également l’action bienfaisante, et à des amitiés dont nous avons pu mesurer aussi la sûreté et le prix, la France a, dans le monde, une situation qu’affermit encore l’esprit de justice et de paix, avec lequel elle envisage les divers problèmes posés par la force des choses devant les nations.

Cet esprit continuera à être le nôtre et c’est pourquoi nous poursuivrons, avec confiance, une politique qui sert également à nos yeux la cause de notre patrie et celle de la paix du monde.

L’opinion a déjà compris le sentiment de confiance réciproque et de sincère concorde qui a rapproché les républicains qui sont devant vous. Nous sommes certains que tous les bons citoyens s’associeront à notre pensée et répondront à notre appel ".

 


L'ordre du jour de confiance, présenté par les députés Mougeot et Couyba et quelques autres, et acccepté par le gouvernement (" La Chambre, confiante dans le gouvernement, passe à l'ordre du jour") est approuvé à 305 voix contre 197.

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