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Bio à lire

24 Décembre 2006 , Rédigé par Moi Publié dans #Lectures



Je viens de lire la biographie de plus de 900 pages que Jean-Christian Petitfils a consacrée à Louis XVI; je la conseille vivement: appuyée sur les dernières "avancées" historiques, bien documentée, s'appuyant sur des sources intéressantes, l'auteur nous présente une vision renouvelée du personnage de Louis XVI, dont il ne nie certes pas les faiblesses: le manque de résolution, notamment, qui lui couta finalement si cher et qui l'empêcha de rompre les pressions diverses auxquelles il fut soumis et auxquels il céda après leur avoir résisté.
Cependant, par ailleurs, l'image personnelle du roi est renouvelée: élevé dans l'esprit du parti dévot et de la nostagie d'une monarchie patriarchale par ses parents et ses éducateurs, par réaction à l'image offerte par Louis XV, Louis XVI fut un roi cultivé, intéressé par son époque et par la politique, notamment les affaires étrangères et la marine, lecteur de Montesquieu et des journaux anglais, fin connaisseur des institutions de ce pays, et finalement convaincu que la monarchie française devait se réformer.
C'est tout le paradoxe que Louis XVI roi réformateur, abolissant les corvées, le servage, la question préalable, les lettres de cachet, reconnaissant l'existence légale des Protestants et s'apprêtant à en faire de même pour les Juifs si la Révolution n'avait éclaté, favorable à l'égalité de tous devant l'impôt, ait fini sous le couperet de la guillotine où l'envoyèrent Robespierre et les sans-culottes parisiens.
Il faut dire que tout s'est ligué pour détruire son image et celle de sa femme: le célèbre Necker, idole du peuple, qui, pourtant, fit la guerre d'Amérique à coups d'emprunts, mais qui, utilisant l'embryon d'opinion publique, par un tour de passe-passe, fit croire qu'il avait laissé un excédent en quittant les finances en 1781 pour mieux faire retomber sa propre faute sur ses successeurs et la reine "madame déficit"; les grands, écoeurés que Marie-Antoinette réserve les charges auprès d'elle à des gens de petite noblesse, au détriment des Noailles ou des Rohan, grands noms du royaume, les parlementaires, hommes de robes, pour la plupart nobles qui refusent d'abandonner leurs privilèges, de même que le haut-clergé.
Ces derniers, nobles, parlementaires et clercs s'unissent contre l'égalité devant l'impôt, proposée par Calonne, contrôleur général des finances, en 1787, et trouvent le moyen de se faire passer pour les défenseurs de la nation auprès de l'opinion publique pour mieux discréditer le pouvoir royal; persuadés de pouvoir mettre le roi sous tutelle, comme ils en avaient rêvé sous le Fronde, ils réclament à grands cris la réunion des Etats-Généraux.
Dès lors, Louis XVI, abasourdi par cet échec, entre en dépression profonde et ne contrôle plus les événements.
Pourtant, il croit encore, que, grâce aux Etats-Généraux, une union du Tiers avec le pouvoir royal permettra de sortir de la crise, mais, faute de résolution, il laisse le temps s'échapper, peut-être à nouveau déprimé par la mort du premier dauphin, pendant l'ouverture des Etats-généraux, d'autant plus que les députés refusent de suspendre leurs travaux pour permettre au roi d'avoir une période de deuil.
Malgré tout, les transformations de 1789 sont acceptées par Louis XVI, contrairement à ce que montrait l'historiographie traditionnelle; le roi accepte la limitation de ses pouvoirs, est prêt à en discuter, etc..., mais, les députés, imbus de la souveraineté nationale, laquelle finira par se transformer plus tard en démocratie totalitaire, refusent toute discussion au profit d'une politique du "diktat".
Dans ce contexte, le renvoi de Necker, qui conduit à la prise de la Bastille, n'est que le fruit d'un malentendu avec un roi que refusera toujours de faire verser le sang de son peuple.
Commence alors la lente descente aux Enfers qui conduira le roi de Versailles aux Tuileries puis des Tuileries au Temple et à la Place de la Concorde sous le couperet de la guillotine; entrecoupé de la tentative de fuite à Montmédy qui se solde par l'arrestation du roi à Varennes en 1791, dont Petitfils nous montre qu'elle était conçue dans l'esprit de Louis XVI comme un moyen de négocier avec l'Assemblée la limitation de ses pouvoirs dans un sens qui lui soit un peu plus favorable.
Bref, une bio à lire, un peu lente à s'installer au début, avec un passage sur les finances royales un peu indigeste pour les non-initiés, mais qui mérite vraiment d'être lue: vous ne verrez plus Louis XVI de la même façon après l'avoir lue, ni même Marie-Antoinette.

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H
Jerem, avant moi déja tu disais que la vision de cette époque est différente après la lecture de cet ouvrage.Sans renier les principes de 1789 que Louis XVI et même Marie-Antoinette approuvaient ("eh bien je serai Reine du Tiers-Etat") je suis un fervent défenseur de cette fin d'Ancien Régime qui vit naître la sensibilité politique actuelle.Combien de livres ont été écrits sur la dernière Reine de france, je les ai pratiquement tous, y compris la première biographie de Montjoye de 1797 ; eh bien j'attends la parution d'un ouvrage définitif, documenté et honnête comme celui de Louis XVI.Si tu veux en discuter, sur mon blog, en cliquant sur ma photo, tu as mon adresse électronique.Je suis ravi de cette co-incidence offerte par cette lecture.A bientôt.
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M
Il paraît qu'il mesurait plus d'1m90. Le mythe du petit gros s'effondre aussi.
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J
Mes connaissances en histoire sont faible et je pense, "un jour" m'acheter un live du genre "l'histoire de france pour les nuls". ça sera déjà un bon début pour ma culture personnelle !
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L
Encore une bio sur Balladur..pffffff !!!
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