Gallbraith disait

3 Août 2011 Publié dans #Articles de réflexion

On retrouve parfois dans ses archives des pépites, comme cet article que j'avais consacré à l'une des dernières entrevues accordées par l'économiste John Kenneth Gallbraith. Je vous laisse découvrir ou redécouvrir celle-ci.

L'un des derniers grands économistes keynésiens vient de s'éteindre à l'âge de 97 ans. Cet homme a eu une influence considérable aux Etats-Unis lorsque les démocrates étaient au pouvoir, conseillant Roosevelt, Truman, Kennedy, Jonhson et Clinton. Je me suis "amusé" à rechercher des analyses faites par Galbraith; en ce jour du 1er Mai, rappel des luttes des travailleurs pour de meilleures conditions de travail (voir les manifestations en Asie aujourd'hui), elles sont toujours d'actualité. je vous mets quelques passages d'un entretien qu'il avait accordé au Monde récemment.

- En France, actuellement, on oppose l'emploi et le maintien d'un salaire minimum, notamment pour les jeunes... C'est la raison pour laquelle les étudiants sont dans la rue. Je ne crois pas du tout qu'en réduisant les salaires on luttera contre le chômage. Au contraire. Si vous baissez les salaires, vous diminuez le pouvoir d'achat et donc in fine vous augmentez le chômage! Les gens qui veulent baisser les salaires s'appuient sur une théorie économique qui fleurissait avec Ricardo au XIXe siècle, et qui a été depuis longtemps abandonnée. Les tenants de cette idée veulent, en fait, économiser de l'argent ; leur argument est un habillage superficiel de la traditionnelle exploitation des salariés, y compris des plus jeunes. Je soutiens fermement le salaire minimum. Sans aucun compromis possible. (Très très bien ce passage, je trouve).

- Comment relancer les économies alors que la plupart des gouvernements ont accumulé d'énormes déficits budgétaires ? D'abord il faut rendre les systèmes fiscaux efficaces et progressifs. La progressivité est importante car, dans tous nos pays, les riches ont le choix de dépenser ou non, d'investir ou de ne pas investir. Les pauvres n'ont pas ce choix. Un système fiscal progressif garantit donc un flux de demande globale. Il n'est pas seulement juste, mais aussi fonctionnel et utile à l'économie. " Ensuite, lorsque le chômage devient massif, il est économiquement plus rationnel de créer de la richesse en donnant du travail aux gens, que d'en perdre en les laissant chômer. Le déficit est devenu un argument conservateur pour refuser l'intervention de l'Etat. Aux Etats-Unis, la droite adore le déficit, car à chaque fois qu'on propose de faire quelque chose pour améliorer la protection sociale, la santé, ou lutter contre le chômage, les conservateurs le refusent au nom du déficit.

- Vaut-il mieux donner des emplois aux chômeurs ou leur garantir un certain niveau de protection sociale ? Je ne vois pas de conflit entre les deux. Dans les années 30, les Etats-Unis ont massivement amélioré la protection sociale ; en même temps, ils ont lutté contre le chômage, avec un succès certes inégal, mais les deux vont de pair.

- Prenons le cas des privatisations. Elles se sont généralisées dans le monde et continuent... Les privatisations ne peuvent pas être traitées de façon théorique et générale. Il y a des domaines où le secteur public est essentiel, d'autres où rien ne peut remplacer le marché. Lorsqu'il s'agit de produire des biens de consommation ou de gérer des services comme les restaurants, les hôtels, etc., personne ne penserait au socialisme. Mais lorsqu'on parle de chemins de fer, d'écoles, de logement social, il n'y a pas d'alternative à la propriété publique.

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