L'écroulement final
La démission du ministre de l'intérieur, resté à peine trois mois en fonction, rattrapé par une scandaleuse affaire de rémunération de ses propres filles de 15 ans sans l'accord de l'Inspection du travail, pourtant obligatoire pour le travail des mineurs de moins de 16 ans et pour des salaires visiblement élevés pour les tâches de simple archivage et de classement qu'elles auraient réalisés, marque l'écroulement final d'une présidence calamiteuse qui se sera trop souvent montrée engluée dans les affaires plus ou moins sérieuses ou ridicules, de Cahuzac au président à scooter en passant par Thévenoud, faible et hésitante - et même brouillonne quelquefois comme sur l'affaire de la déchéance de nationalité ou le défilé en faveur des libertés à côtés de dictateurs patentés de la planète -, trop souvent inféodée aux intérêts germaniques, bien trop pro-business pour être honnête, bien plus attachée aux continuités (continuité de la politique de Sarkozy en matière d'économie et de finance, continuité dans certaines amitiés équivoques avec les dictateurs africains au nom des intérêts de Total et d'Areva, continuité dans le "léchage de cul" des Chinois, des Qataris ou de l'Arabie Saoudite, continuité dans la politique scolaire, Vallaud-Belkacem ne faisant qu'appliquer au collège une réforme engagée par la droite au lycée) bien plus que par des ruptures pourtant hautement souhaitées par ses électeurs. Mais, président élu par défaut et sans enthousiasme - il est, avec Chirac, le seul à n'avoir pas pu rassembler sur son nom une majorité absolue d'inscrits -, Hollande a été incapable de se hisser au niveau du costume qu'il pourtant s'était lui-même taillé dans le célèbre: " Moi, président...", assistant bien trop souvent en spectateur de sa propre présidence bien plus qu'en acteur. Finalement, il restera dans l'Histoire comme "l'absent" qui ne s'est brièvement réveillé qu'au lendemain de Charlie Hebdo, pour retomber très vite dans ses flottements, ses travers, son indécision, ses contradictions.
Le tout a donné une présidence archaïque, peu adaptée au monde moderne, très "chasse, pêche, nature et traditions", incapable de penser l'avenir et surtout incapable de bousculer et de remettre en cause les vieilles idées libérales et la Très Sainte Union Européenne. Aussi, du même coup, comme partout ailleurs en Europe, elle a tué la sociale-démocratie en France parce qu'Hollande n'a rien eu à proposer sinon que de suivre la même politique que celles des démocrates-chrétiens alors qu'il avait élu pour la combattre.
Et, à cet égard, Macron en est l'ultime avatar avec son projet d'UMPS pour gouverner de Robert Hue à Alain Madelin en passant par Kouchner et Cohn-Bendit, témoignant de la dérive droitière d'une gauche "plus rien" et devenue totalement soluble dans le giscardo-pompidolisme dont Sarkozy et Hollande ont été les dignes héritiers. Il était d'ailleurs marquant de voir, hier soir, durant le débat sur TF1, à quel point Macron évitait de sortir du flou - on ne sort du flou qu'à ses dépens et quand c'est flou, il y a un loup, les électeurs devraient peut-être s'en souvenir avant de voter les yeux fermés pour ce clone de la gauche "plus rien" -, se contentait de propos lénifiants, adoptant par une sorte de mimétisme bizarre des tics et/ou des postures "présidentielles" empruntés à Sarkozy comme s'il se croyait déjà élu, évitant de trop insister sur sa réforme des retraites, et pour cause, puisqu'il propose un système par point où l'Etat fixe de façon arbitraire la valeur du point en fonction de paramètres qu'il contrôle lui-même et peut biaiser à sa guise pour léser le plus de retraités possibles. De même, on a bien remarqué qu'il évitait de prendre position sur le burqini, renvoyant la gestion aux maires - faux-cul ! - et qu'il était le seul des 4 candidats à n'avoir rien proposé pour lutter contre le terrorisme sur notre sol. Il est vrai que quand on va de Robert Hue à Madelin, c'est un peu dur de présenter un programme clair sous peine de faire éclater son propre mouvement !
Elire Macron, c'est donc en reprendre 5 ans de plus de Sarkhollandisme, d'immobilisme, d'Etat à la dérive qui forge lui-même sa propre impuissance avec, en plus, un risque énorme, c'est l'ingouvernabilité du pays car enfin, avec quelle majorité va-t-il gouverner s'il est élu ? L'assemblage hétéroclite qui le soutient et qui ressemble plus à l'état-major du général Boulanger qu'à celui d'un parti organisé et structuré, est bien trop divers idéologiquement pour ne pas éclater après quelques mois de pouvoir sans compter qu'il est fort douteux que "En marche !" ait une majorité à lui tout seul. Soit il sera l'otage de la droite, soit - et ce n'est pas impossible - la droite sera majoritaire en nombre de députés et Macron n'aura d'autre choix que de nommer le chef de cette majorité de droite, probablement Fillon, comme premier ministre, ce qui serait un comble et un comble pas du tout impossible !
Bref, il est fort possible que d'Hollande ne reste qu'une seule image, celle d'un fossoyeur.