L'inquiétant Monsieur Macron
L'historien Jean Tulard le faisait déjà remarquer il y a longtemps: " Face aux périls intérieurs et extérieurs menaçant ses intérêts, la bourgeoisie française a toujours su s'inventer un sauveur et, pour la présidentielle 2017, elle semble avoir dévolu ce rôle à un nouveau produit marketing issu de la gauche plus rien hollandiste et appelé Emmanuel Macron (ou Mc Rond si l'on considère et l'aspect purement commercial du produit et ses opinions sphériques faites pour éviter de fâcher trop de monde) après avoir un temps hésité avec le psycho-rigide Fillon. Il fallait d'ailleurs voir récemment Macron lire, sans en comprendre une seule ligne de son aveu même, son programme pour l'enseignement supérieur, pour comprendre à quel point il n'est qu'une marionnette destinée à faire le guignol avec sa belle gueule qui lui a valu le soutien de Boy George qui le croyait gay avant qu'il ne se rétracte quand il a su que Macron ne l'était pas, tandis que ceux qui s'apprêtent à prendre le pouvoir agissent en coulisse pour faire gagner le playboy Macron qui concentre à lui seul les tics de Sarkozy, le flou de Hollande et le programme économique et social de Giscard et Barre.
Et cette bourgeoisie qui contrôle la presse, les médias et les instituts de sondage et qui nous gave chaque jour des exploits de "la merveille" tout en écartant d'un revers de main les affaires qui le concernent, n'a pas hésité à prévoir de se goinfrer sur le dos des Français: nouvelle casse du code du travail, suppression de l'ISF sur le financement du capital, nouveaux allégements de charges, pas touche à la directive sur les travailleurs détachés, poursuite d'une politique migratoire qui offre de la main-d'oeuvre à bas coût exploitable à merci, poursuite d'une construction européenne faite uniquement au profit des banques et du grand capital, collaboration renforcée avec l'Allemagne... rien n'est trop beau pour afficher sa connivence avec Pierre Gattaz qui lui, porte des costards et, contrairement aux salariés de Gad, n'est pas un illettré !
Mais il y a encore plus grave dans cette exercice de prestidigitation et de mystification, c'est l'aspect profondément illibéral du programme auquel personne ne semble prêter attention. C'est pourtant le Mein Kampf du candidat Macron: reprenant la vieille rhétorique du bonapartisme sur le thème du "droite/gauche, c'est ringard, vive l'UMPS (oui, parce qu'au stade où on en est, on en est quand même-là, surtout qu'il chasse à droite sur les mêmes terres que Fillon, draguant catholiques et gens de la Manif pour tous, humiliés, dit-il, par le mariage gay !), il n'est question que de spoil system (système des dépouilles), autrement dit de placer les potes et les amis des potes aux postes les plus élevés de la Nation afin qu'ils puissent, comme François et Pénélope, Thomas et Jérôme, se servir grassement sur le dos des Français, de législation par ordonnances pour casser plus vite le Code du travail, d'usage plus fréquent de la procédure d'urgence, de vote bloqué, etc... Soit d'utiliser les articles les plus suspects et les plus sombres de la Constitution, normalement prévus pour des cas exceptionnels, mais que Macron entend ériger en système de gouvernement normal.
Il faut dire que, quand on voit la gueule du mouvement qui le soutient, il y a de quoi être tordu de rire et se demander comment un mouvement constitué de bric et de broc va pouvoir demain former une majorité stable: de Robert Hue à Dutreil et Madelin en passant par Kouchner - celui qui s'est pacsé avec Kadhafi - ou les vieilles raclures de la Mitterrandie comme Attali, on comprend vite pourquoi Macron veut utiliser au maximum les procédures exceptionnelles pour gouverner, parce que cette majorité n'est tout simplement pas viable.
On attend d'ailleurs avec impatience la gueule de son premier gouvernement parce que c'est bien beau de proclamer qu'on aura des spécialistes aux postes-clés - c'est l'autre grand mythe du bonapartisme qu'exploite à fond Macron qui prétend ainsi éradiquer l'opposition droite/gauche - il n'en reste pas moins que ce n'est pas parce qu'on a été patron du RAID qu'on peut faire un bon ministre de l'intérieur, les ministres-généraux durant la Première Guerre mondiale ayant nettement montré leur totale nullité au point qu'on finit par confier définitivement ce ministère à des civils - et prions pour qu'on ne retrouve pas la vieille Nota au ministère du travail !
D'ailleurs, aura-t-il même une majorité ? C'est là une chose très incertaine. En Marche ! ajouté à quelques modems et quelques socialistes proches de Valls, outre que ça n'est d'accord sur pratiquement rien, ça risque de ne pas faire le poids face à des notables locaux souvent bien implantés, et, à ce jeu, les Républicains risquent de sortir grands vainqueurs. C'est là l'autre paradoxe de Macronisme, mouvement né pour permettre à la gauche plus rien de Hollande de rester au pouvoir par tous les moyens et qui risque de devoir confier les clés de Matignon au chef de l'opposition parlementaire, probablement Baroin qui, sagement, attend son heure.
Car, et c'est là la grande faiblesse de Macronisme: à aucun moment le scénario catastrophe d'une victoire à la présidentielle et d'une défaite aux législatives n'a été sérieusement anticipé, ni celui d'une chambre totalement éclatée en groupes divers version 4ème République qui rendrait le pays totalement ingouvernable.
Enfin, s'il est élu, au moins, on pourra tenir les journalistes pour entièrement responsables de ce qui arrivera durant son mandat tant ils ont tout fait, absolument tout, pour le porter à bout de bras au pouvoir, d'autant plus que sa légitimité risque de n'être pas bien forte avec un président pro-business et pro-européen alors que le peuple français est majoritairement pro-souverainiste et hostile à l'ultra-libéralisme giscardo-pompidolien. Puis, face à Trump, Poutine et Xi Jinping - ne jamais oublier ce 3ème compère si peu démocrate - on se demande bien comment ce Macron totalement inexpérimenté va bien pouvoir peser, tellement il a l'air de s'énerver un peu trop facilement à la moindre contrariété - un autre défaut qu'il partage avec un certain Nicolas Sarkozy.